Comment expliquer les records des marchés actions et cryptomonnaies ?
Les marchés actions et cryptomonnaies ont atteint des niveaux records ces dernières semaines. Eric Bleines, le directeur Général de Swiss Life Gestion Privée, fait le point sur les tendances du marché.
Les marchés actions ont atteint des niveaux records ces dernières semaines
Malgré un contexte géopolitique difficile et un ralentissement économique en Europe, les Bourses enregistrent des progressions impressionnantes. En effet, le Nikkei japonais gagne 17 % depuis le début d'année, l'EuroStoxx, 7,8 %, le Nasdaq, 7,2 % et le CAC 40, 5,1 %. Ces hausses sont le reflet de publications de résultats particulièrement solides ces dernières semaines, qui sont allées au-delà des attentes du marché. C'est tout particulièrement vrai aux Etats-Unis où les trois-quarts des entreprises ont surpris positivement les investisseurs, avec des révisions à la hausse des croissances des bénéfices de 8 % en moyenne. Ces surprises positives ont été plus rares et de moins grande ampleur en Europe, notamment du fait des petites et moyennes capitalisations. Ce sont ainsi les grandes valeurs du luxe et surtout de la technologie qui ont tiré le marché, tandis que des secteurs comme l'immobilier – qui souffre des taux élevés – ou encore les produits de base – pénalisés par le ralentissement chinois – sont dans le rouge depuis le début d'année. Ce rallye boursier est donc très concentré.
Comment analyser cette dynamique autour de la technologie ?
Les marchés voient dans l'intelligence artificielle (IA) générative une thématique d'investissement puissante et les résultats exceptionnels de certaines entreprises technologiques, tant sur le plan du chiffre d'affaires que de la marge, non seulement leur donnent raison mais parviennent même à les surprendre. Le fabricant de micro-processeurs américain Nvidia a annoncé un bond de son résultat net de 286 % sur un an, à 12,3 milliards de dollars, et son carnet de commandes continue de se remplir !
Avec l'IA générative, c'est une révolution technologique profonde qui est en train de se diffuser dans l'économie. Elle profite à certains fabricants de microprocesseurs comme Nvidia ou ASML, mais pas Infineon ni STMicroelectronics qui sont surtout tournés vers l'industrie traditionnelle. Elle tire aussi d'autres acteurs qui l'utilisent pour développer de nouvelles applications, comme les GAFAM aux Etats-Unis mais également CapGemini, Publicis ou SAP en Europe.
Dans quel contexte macroéconomique ce rallye boursier s'inscrit-il ?
L'inflation continue de ralentir, quoiqu'à un rythme plus lent au fur et à mesure que l'on approche de la cible des 2 %. Fait plus étonnant, les anticipations de croissance pour les Etats-Unis ont été fortement réévaluées depuis le début d'année : le PIB américain est désormais attendu en hausse de 2 % en 2024 (contre +1,3 % précédemment), grâce à une consommation dynamique notamment permise par la modération des prix de l'énergie et une réindustrialisation massive liée aux investissements de l'Inflation Reduction Act.
Cette résilience éloigne la nécessité, pour la Fed, de baisser ses taux directeurs rapidement, ce que les marchés ont acté : les taux souverains ont gagné 0,30 % depuis le début de l'année, tempérant leur enthousiasme de fin 2023. Du fait de la faiblesse de sa croissance, la BCE aurait, de son côté, davantage de raisons de baisser ses taux à court-terme, mais elle ne le fera vraisemblablement pas avant la Fed, pour ne pas pénaliser l'euro.